Comment gérer le « plan de travail » ?

Réuni·es en atelier en décembre 2025, nous nous sommes posé les questions que se pose tout·e enseignant·e qui veut travailler en plan de travail… Comment termine-t-on un plan de travail ? Quels outils utiliser ? Est-ce compatible avec des fichiers ou manuels classiques ? Comment motiver les élèves qui évitent ou refusent le travail ? Comment faire faire des maths à celui ou celle qui veut toujours faire des jeux ? Comment éviter d’être débordé·e ? Comment mettre en place le plan de travail ? Est-ce adapté à toustes les élèves ? A quel moment de la journée ? Que mettre dans le plan de travail ? Les élèves doivent-iels travailler seul·es ou peuvent-iels travailler en groupes ?

Quel matériel ?

Bien sûr, les enseignant·es qui fonctionnent en plan de travail depuis longtemps ont souvent dans leurs classes des outils en libre accès, auto-correctifs, organisés par niveaux… Par exemple, les fiches PEMF, les fiches et ceintures Pidapi, etc. Mais quand on se lance dans le plan de travail, on peut mettre dans le plan de travail ce qu’on a sous la main. Pour se lancer, pas besoin de bouleverser tout son fonctionnement. Si on a la méthode MHM, on peut par exemple mettre uniquement les mini-fichiers dans le plan de travail des élèves. Si on a une autre méthode de français ou de maths, on peut photocopier des exercices.

On peut partir pour commencer sur deux ou trois rubriques, pas davantage : poésie à recopier (prévoir un recueil de poésies à choisir), mémoriser, illustrer ; texte libre à écrire, corriger, recopier, illustrer… Il existe aussi, si l’on a un ou plusieurs ordinateurs en fond de classe, des logiciels de lecture-compréhension tels que « Tacit », créé par l’université de Rennes, ou d’autres pour les maths… On peut avoir des boites ou tiroirs avec des ateliers en libre accès : numération, calcul, grammaire, etc.

Quand on utilise des ceintures de type Pidapi, la question du rangement se pose. Faut-il laisser les fiches de ceintures en libre accès ou bien sont-elles distribuées par l’enseignant·e ? La question peut être posée au Conseil de coopération.

Quant à la feuille de route de chaque élève, elle se présente de manière différente selon les classes : tableau vide à remplir au fur et à mesure de l’avancement du travail (cases poésie, case fiches de maths, etc. à cocher), ou bien le travail est spécifiquement indiqué pour chaque élève, ce qui est plus chronophage pour l’adulte qui prépare en amont. Un compromis entre ces deux approches pourrait être : tout le monde a la même feuille de base, mais certaines cases sont surlignées pour certains élèves, afin d’indiquer ce que l’élève doit faire en priorité.

Pour s’aider, chaque élève peut disposer d’un porte-vue d’outils type Pidapi (toutes les « leçons » du cycle 3 en français et maths données à l’avance, y compris tables de multiplications, tableaux de conjugaison, principales règles d’orthographe, etc.) auquel il peut se référer. Les élèves sont aussi incités à consulter les documentaires, les dictionnaires, les affichages, les aide-mémoires…

Quels temps ?

Le Plan de travail peut être commencé dès la rentrée de septembre. Chaque jour on introduit une nouvelle activité. Par exemple jour 1 texte libre ; jour 2 poésie ; jour 3 fiches de maths ; etc. A la fin de la première quinzaine, tout le monde a vu toutes les activités possibles du PDT et chacun·e peut commencer à organiser son travail librement en toute connaissance de cause.

On fait du PDT entre une demie heure et une heure par jour. En tout cas de manière régulière. Certains d’entre nous ont en plus des créneaux plan de travail « création » ou « production » pour les activités qui sont bruyantes : travail de groupes, exposés, expériences scientifiques, jeux de société, arts plastiques, etc.

Afin de moins se déranger les uns les autres, ou de rester concentrés, certaines classes proposent en Conseil de partager les créneaux Plan de travail en 40 minutes de ceintures et entraînement / 20 minutes de « projets » ou « temps personnel » pour faire des activités qui peuvent déranger les autres. D’autres élèves proposent en Conseil qu’on ne puisse accéder au « temps personnel » que si l’on a fini le travail obligatoire. Quoi qu’il en soit le temps de PDT « calme » peut aussi être fait à l’occasion quand l’emploi du temps a été décalé et qu’il reste une demi-heure libre avant autre chose. Bref, le Conseil a un grand rôle à jouer pour l’organisation du PDT et ses éventuelles modifications : tutorat, règles d’accès au matériel, créneaux horaires, etc.

Comment terminer et valider le Plan de travail ?

Dans le cas d’un PDT sur 2 semaines, en fonction du travail effectué sur la quinzaine, l’élève acquiert un niveau d’autonomie 1, 2 ou 3. Avec le niveau 1, on ne peut pas choisir son travail et le maître est tout le temps « sur leur dos » pour vérifier l’avancement du travail. De plus, au niveau 1, l’élève ne peut se faire aider que par l’adulte, et ne peut pas aider les autres (on constate souvent que les élèves qui « papillonnent », de déplacent beaucoup sans avancer dans leur travail, prétendent souvent « aider » les autres). Ces élèves-là peuvent être invités à s’assoir à côté du bureau de l’adulte pour travailler sous surveillance. Au niveau 2, le maître vérifie de temps en temps la progression. Au niveau 3, l’élève choisit son travail sans vérification, mais attention, si le travail n’est pas satisfaisant, il ou elle repasse au niveau 2 la quinzaine suivante.

Pour valider le PDT, il y a plusieurs manières de faire : soit un travail obligatoire est défini (tant de fiches de lecture, tant de fiches de maths, etc.) et le PDT sera fini au minimum quand ce travail sera fait (avec le risque de ne jamais terminer) ; soit, quelque soit le travail fait, le PDT est considéré comme terminé au bout de deux semaines et l’on compte alors la quantité de travail effectuée.

Certain·es enseignant·es proposent aux élèves des PDT sur une, deux, ou trois semaines. Avantages : on ne doit pas faire le bilan de tous les PDT en même temps puisque c’est en décalé ; les élèves peu autonomes peuvent choisir le PDT à la semaine, ce qui leur permet d’atteindre plus vite des objectifs modestes. Quand il y a une monnaie de classe, le paiement intervient alors plus vite, ce qui peut être motivant pour l’élève.

Le plan de travail ne risque-t-il pas d’accentuer les écarts de niveaux entre élèves ?

Comme le dit un texte de l’ICEM 34, notre pédagogie vise à faire progresser tous les élèves et à réduire les écarts de niveaux. Le PDT permet que chacun·e travaille et progresse à son niveau. Cela va de pair avec, par exemple, une exposition des savoirs collectifs sous forme de rituels plus que de séquences. Les savoirs sont ainsi vus, revus, rebrassés de manière circulaire. L’élève qui a découvert une notion au cours de son travail individuel va être incité·e à en faire part aux autres lors du travail collectif sur cette notion. Il ou elle devient alors personne-ressource pour la classe.

L’hétérogénéité est là, quoi qu’on dise, quoi qu’on fasse, c’est la réalité de nos classes, et cela n’est pas dû à des techniques pédagogiques particulières. Le décalage qu’on observe dans les niveaux des élèves est toujours là, quelle que soit la pédagogie choisie. Quand on fait une leçon collective, on voit bien qu’un quart des élèves a du mal ou décroche complètement, qu’un autre quart avait déjà compris et maîtrisé la notion, et s’ennuie… Et que la leçon est utile pour à peine une petite moitié de la classe ! L’avantage des rituels est de : (1) sécuriser l’élève ; (2) libérer du temps cognitif puisque la consigne est presque tout le temps la même ; (3) donner le temps à chacun·e de comprendre, maîtriser, expliquer aux autres, découvrir… Ainsi, celles et ceux qui auront déjà vu la notion mise en jeu au cours de leur travail individuel, peuvent être tuteurs pour les autres, apporter un étayage, ou au contraire profiter du rituel pour affermir la notion.

Le plan de travail n’induit-il pas une masse énorme de corrections pour l’enseignant·e ?

Au quotidien, il y a des ceintures et préceintures à valider, des textes libres à corriger, des poésies à évaluer… Mais la validation finale des PDT au bout de la quinzaine ne prend pas tant de temps que cela. Environ 3 minutes par élève. Le plus long étant souvent de compter les infractions ou « gênes » qui se traduisent dans la rémunération sous forme d’amendes. Les élèves très autonomes auront eux-mêmes marqué tout leur travail dans les bonnes cases. C’est pour les élèves les moins autonomes que la validation prend le plus de temps. Mais cela n’est pas tellement plus long que les habituelles corrections de cahiers du jour connues de tous les enseignants du primaire. A condition de faire le bilan sans les élèves (sur la pause de midi le dernier vendredi, par exemple)

Pendant le temps de travail individuel, l’enseignant est très sollicité. Fabien nous partage donc son organisation, trouvée par le Conseil de sa classe. Il y a trois files d’attente matérialisée sur son bureau par trois barquettes différentes. Chaque élève dispose d’un passeport de classe (papier à son nom) qu’il dépose dans l’une des trois barquettes : soit pour se faire aider ; soit pour se faire corriger un texte ; soir pour une autre correction. La priorité est donnée à l’aide des élèves en niveau d’autonomie 1.

Si vous avez des remarques ou des questions sur le Plan de travail, n’hésitez pas à nous en faire part en commentaire.